« Alors ? Tu comptes te dégonfler Navy ? » me demanda Sasha, sur un ton de défi, alors qu’on arpentait les rayons d’une grande surface. Sasha et moi on se connaissait depuis un petit plus de dix maintenant et nous étions aussi proche que les deux doigts d’une même main. On faisait pratiquement tout ensemble, de nos devoirs, à nos virées shopping en passant par nos défis stupides. Comme celui-ci. Quelques semaines auparavant, on avait parié que j’allais réussir à battre le record au cent mètre nage libre, dans le cas contraire je devais me teindre les cheveux en rose pendant une semaine. Je n’avais pas battu le record, il me manquait à peu quelque millième de secondes pour battre ce fameux record. En sortant du bassin, je me rappelais très bien du visage de Sasha. Il brillait de jubilation, rien qu’à l’idée de voir mes cheveux bruns devenir roses. J’avais été tellement sure de moi, bon comme à mon habitude je l’avoue. Mes résultats scolaires étaient toujours excellents, je mettais un point d’honneur à être la meilleure, dans tous les domaines possibles. Pour une fois que je n’étais pas à la hauteur de mes prouesses scolaire, c’était un jour à marquer d’une pierre blanche. Sasha n’avait donc pas cessé de me rappeler que je devais honorer mon pari. Nous étions donc dans cette grande surface marchande, vagabondant dans des rayons et je cherchais un moyen d’échapper à cette coloration.. Mais je ne voulais pas perdre la face devant mon amie, ni devant les autres élèves qui avait été témoins de ce pari quelque peu stupide.« Pas du tout Sash'. Ca serait pas mon style voyons » m’exclamais-je en réponse à Sasha. Je m’arrêta dans le rayon coloration et j’en pris une rose, tellement criarde, tellement fluo que ses camarades allaient se rappeler toute leur vie de ses cheveux roses et sa compétitivité.  


Bien évidemment, ma mère avait été choquée de mes cheveux roses et m’avais privée de sortie pendant plusieurs semaines, mais ça en valait la peine. Jamais n’aurai perdue la face, jamais je ne le laisse une dette impayée et dans ce cas là, un pari non accomplie. Mon frère, Jayden, mon ainée de dix mois n’avait pas pu s’arrêter de rire pendant des heures et même des semaines après mon retour à mon brun naturel.« C’est marrant cette couleur… On dirait une boule de chewing-gum vivante ! Remarque ça colle bien à ta personnalité… » m’avait-il lancé lorsque j’avais sécher mes nouveaux cheveux roses pour la première. « C’est marrant aussi, je vois ta bouche bouger mais je ne comprends rien à ce que tu dis. Je ne comprends la langue des idiots désolée… ! » répliquais-je du tac au tac. Je n’étais pas au top de ma répartie mais pour ma défense j’avais eu une longue journée…  Mon frère était reparti, vexé, non sans laisser échapper une autre remarque sur ma couleur inhabituelle. Ah.. mon grand frère, ce rigolo en chef. Et ça, être le petit chef, il savait faire. Si je devais désigner mon plus grand ennemi, je le désignerai sans hésiter. On était tout les deux dans la même classe et on se livrait bataille pour avoir les meilleures notes, être invités aux meilleures fêtes et devenir le préféré du moment notre mère. C’était un petit jeu assez malsain entre nous, même si nous nous aimions plus que tout (il est clair que je donnerai ma vie pour lui) la compétition et notre sempiternelle perfectionnisme se mettait en travers de nos bonnes relations fraternels. Ayant grandi sans père, puisque celui-ci avait quitté ma mère peu après ma naissance, ma seule figure paternelle que j’ai jamais eu dans ma vie était mon oncle, le frère de ma mère, bien évidemment je ne comptais pas mon frère comme un « père » mais plus comme un petit parasite sur le cheveux de ma réussite. Je rigole hein, je l’aime quand même mon frère. Enfin ça dépend de mon humeur…



 • MAY 2010,  18 years-old. Providence, RI.

Premier entretien d’embauche de ma vie, et surtout le plus important et le plus décisif de pour mon futur. J’étais devant la porte de la Rhode Island Design School pour mon entretien d’entrée, j’ai toujours voulue devenir architecte d’intérieur. Dessiner des plans, décorer et re-décorer des pièces, rendre les sculptures que je dessinais réelles etc. Mes notes et mes résultats aux SATs atteignit presque la perfection, j’avais longtemps travailler et ça payer enfin. J’avais envoyer mes dossiers dans les meilleurs écoles de design du pays et il fallait se rendre à l’évidence, le Rhode Island avait la meilleure école pour le cursus que je voulais faire. J’entra dans le bâtiment et me rendit à mon rendez-vous. Je pris une grande inspiration et je tentais de me convaincre moi-même que j’allais gérer cet entretien, qu’il allait m’adorer, que ma place était à providence. Une fois dans la salle, le recruteur me souri et m’indiqua un siège, mon dossier scolaire assez imposant dans ses mains. « Bonjour mademoiselle Greatness, je suis enchanté de vous rencontrer, je dois dire que vous avez un dossier scolaire assez impressionnant. » Il me gratifia d’un sourire, que je lui rendis. Mon sourire n’avait jamais été aussi grand et si je continuais à sourire ainsi, mes zygomatiques allaient en souffrir et puis je ne voulais pas paraitre hypocrite. Je savais que j’avais un très bon dossier, je faisais partis des meilleurs à Seattle. Cela ne m’avait pas pour autant rendue prétentieuse. Je n’en restai pas moins une adolescente maladroite et un peu trop perfectionniste. « Merci beaucoup, monsieur, je suis très heureuse de me trouver dans votre établissement. » commençais-je la voix pleine d’assurance. « Je suis très intéressée par votre école, elle fait partie des meilleures et je suis sure que je pourrais apprendre pleins de choses ici et me forger à mon future métier d’architecte d’intérieur. » rajoutais-je en tentant de sonner humble et modeste. J’avais passé ses dernières semaines à lire et à analyser toutes les brochures de toutes les écoles qui proposaient un cursus qui me plaisaient. Seule le Rhode Island m’avait tapé dans l’œil et toucher mon cœur, Providence était une belle ville, agréable et chaleureuse. De plus, c’était la ville natale de mon roman préféré, Carry Me Home. En grande lecture et curieuse de nature, j’avais hâte de rentrer dans cette école , la découvrir et m’y impregnait, tout comme avec cette merveilleuse ville.  Je reporta mon attention sur le recruteur et hocha la tête alors qu’il me décrivait les différentes contraintes du cursus que j’avais choisi. « .... Comprenez nous, nous sommes une écoles assez sélect et nous souhaitons que nos étudiants se donnent à fond dans leur travail. Plus de 60% des designers les plus importants et célèbres sont des anciens de notre école. Nous mettons à point d’honneur à rester au haut de la liste des meilleures écoles. » dit-il en me lançant un regard sous-entendu. Oui, je le savais déjà. Et je savais aussi que j’étais brillante et intelligente. Ne voyait-il pas que j’étais la candidate parfaite pour intégrer leur cursus ?


« Bref, reprends toi Navy, reste calme, réponds gentiment à ses questions et fait bonne impression. S’il te plait, ne deviens pas sarcastique, on ne veut pas reproduire l’échec de Brown », pensais-je mentalement. L’entretien la semaine passé pour l’université de Brown avait était très houleux, je m’étais emporté lorsque la recruteur avait critiqué mes activités extra-scolaires qui n’étaient pas, selon eux, à la hauteur des exigences de l’école. Je m’étais alors emportée et avait été un petit peu (bon ok, très) insolente envers la recruteur qui m’avait allègrement fait comprendre que je pouvais tirer un trait sur leur école. Tant pis, m’étais-je dis. Ils le regretteront bien un jour au l’autre. « Je compte bien faire partie des meilleures élèves de votre école monsieur. Je suis une personne travailleuse, avec un bon esprit d’équipe, je ne m’arrête pas seulement lorsque je suis satisfaite du résultat. Je suis aussi à l’écoute de mes camarades et je sais faire la part des choses entre le professionnel et le personnel. Votre cursus de design d’intérieur est tout ce qu’il me faut pour avoir une carrière professionnelle accomplie. » Répondis-je avec une confiance à toute épreuve. Je l’avoue c’était un discours que j’avais répétée et préparée, j’étais peut être un peu trop préparée et prévisible mais c’était important pour moi. Et lorsque que quelque chose était important pour moi, je faisais tout pour l’obtenir. Et pas seulement au niveau professionnel.

L’interview continua pendant une dizaine de minutes, et le recruteur me posait question sur question. Je lui montrais mes carnets de croquis, mes dessins et mes projets de design. Il avait eu l’air impressionné et j’étais fier de mon petit effet. En sortant de l’école, le soleil rayonnait dehors en ce beau mois de mai et la fraicheur de l’extérieur me chatouillait  doucement la peau. Je jeta un dernier coup d’œil à l’école, sortit mes lunettes de soleil de mon sac à main en disant à mi-voix. « Oui.. je vais me sentir comme chez moi ici.. »



 • PRESENT DAY,  22 years-old. PROVIDENCE, RI.

Un café chaud dans les mains, un carnet à dessins dans l’autre, j’étais attablée dans un petit bistrot en plein cœur de la ville, regardant les passants vaquaient à leur occupation. Voilà trois ans que j’habitais dans la belle ville de Providence. Et je m’y sentait autant ici chez moi qu’à Seattle ma ville natale. J’allais terminais ma troisième année de cursus dans la meilleure école du Rhode Island et mes résultats étaient encore plus exemplaire qu’au lycée, ce qui me remplissait de joie. Moi, l’acharnée du travail. Ces trois années n’avaient pas été toute roses cela dit, j’avais eu des problèmes d’appartement, d’amis, de petits amis.. C’était ça de le désavantage lorsque l’homme que tu as le plus aimé dans ta vie, t’as quitté du jour au lendemain sans donner de nouvelles, avec tout ton argent et les clés de ton appartement. Mais ça c’était une autre histoire, beaucoup plus complexe et profonde… J’avais évolué, grandie et à vingt-deux ans, je me sentais enfin femme. Mature et distinguée. Je n’étais plus une perfectionniste qui ne pensait qu’à être la meilleure, même si je l’étais toujours, je m’ouvrais maintenant au monde, aux personnes alentour et à la beauté de la ville et des habitants de providence. Moi Nevaeh Isobel Greatness, j’étais là. Et je n’étais pas prête de partir.