Se retrouver après dix ans d'absence prenait du temps et s'effectuait étape par étape. Les choses avaient changé, autant pour Caleigh que pour moi. Son caractère, sa façon d'être, elle était bien loin de la fillette que je m'étais efforcée de ne pas blesser depuis son arrivée à l'orphelinat. De mon coté les choses avaient aussi évolué, tant physiquement que psychologiquement. D'ado j'étais passé à homme et de personnalité instable et impulsive, canalisé par Caleigh j'étais devenu un homme plus stable et intégré dans la société. Je m'étais efforcée de bosser dur pour parvenir à la vie plutôt aisée que j'avais aujourd'hui. Le passé n'était pas totalement effacé parce que malgré tout, la présence de Caleigh manquait à ma vie. Unis depuis toujours, la séparation était difficile à maintenir maintenant que je la savais en ville et aussi enjouée que moi quand à l'idée de retrouver nos dix années de perdues. La sachant fan de Rugby depuis qu'elle avait fait ses premiers pas, je l'avais probablement déçue en l'empêchant de venir voir mon dernier entrainement. Elle ne me dérangeait pas le moins du monde, mais avec le nouvel entraineur dont nous avions hérité depuis quelques semaines, autant dire que le public n'était plus tellement le bien venu.. Il m'avait fallu une semaine et un acharnement incroyable - mais surtout un joli mensonge - pour parvenir à faire craquer l'entraineur pour une unique exception : Celle de permettre à ma meilleure amie - cancéreuse et n'ayant plus que quelques mois à vivre - de voir son équipe préférée s'entrainer. Pour le coup, ce "dur à cuire" m'avait semblé pour le moins crédule, le tout restait de lui faire avaler que ma meilleure amie cancéreuse avait l'air en pleine forme. La surprise restait totale pour Caleigh que j'avais simplement invitée à manger. Ce serait bien sur le cas, mais plutôt qu'un bête restau, je lui proposais un Hot-Dog Made in Wyatt après un entrainement intensif qu'elle pourrait enfin regarder de près. Quand au reste de la soirée, elle avait carte blanche. Rester ou rentrer chez elle.
L'eau dévalant mon corps blessé par les entrainements répétés, je me douchais rapidement avant de me secher et d'enfiler un t-shirt/ pantalon noir, surmonté d'une veste en cuir. Les clés de la voiture de sport en main, je me mis avec un peu d'avance en route vers son appartement. Aucune voiture à première vue, peut-être était elle seule ou bien son coloc était il en voyage ? Peu importe, c'était elle que j'emmenais. Sonnant, je me permis d'entrer tout de suite après. Cal'. C'est moi. Je suis en avance, désolée. Mais j'ai une surprise pour toi. Lâchais-je en avançant dans son salon, me laissant aussitôt tomber dans le sofa. Sans réponse, je me laissa guider par instinct vers la chambre à l'étage avant d'entendre couler l'eau. Sans doute sous la douche.

Tout semblait être bien parti, Caleigh avait sorti une robe en prévision de sa sortie avec Wyatt et allait passe sous la douche lorsque Jamie fit irruption dans leur chambre. Il n'était pas censé rentrer avant demain... Il croyait sans doute lui faire une surprise. Lorsqu'elle sentit ses bras se refermer sur sa taille, elle se mordit violemment la lèvre. Son souffle dans son cou la fit frissonner, elle pria pour qu'il ne remarque pas sa robe posée sur le lit mais c'était peine perdue. Elle en avait assez de se cacher, d'avoir peur de lui avouer des choses et cetera. Il savait qu'elle ne l'aimait pas. Plus. Mais il continuait à se comporter comme si c'était le cas. Voir sa robe et savoir qu'elle n'était pas au courant de son retour lui fit péter un plomb, tandis qu'elle exprimait très calmement le fait qu’elle sortait ce soir avec son ami d'enfance. Sa main s'écrasa violemment sur la joue de Cal qui se mit à pleurer de l’œil droit à cause de la violence du coup. Elle porta la main à sa joue et y sentit une griffe sur sa pommette. Elle le gifla à son tour avec au moins autant de force, résultat elle prit plusieurs autres coups. Sans broncher. Jusqu'à ce qu'il s'en aille en claquant la porte. Ce n'est que lorsqu’elle entendit sa voiture démarrer que de grosses larmes roulèrent sur ses joues, suivies par des sanglots qui secouèrent son frêle corps endolori. Elle se décida finalement à se lever, disparut dans la salle de bain et demeura des longues minutes sous l'eau brûlante qu'elle ne sentit pas refroidir. Ses larmes se mêlaient à l'eau, autant de douleur que de ras-le-bol. En sortant, elle enfila un short et un vieux t-shirt qui traînaient dans la salle de bains et prévu de s’installer dans son lit et de faire une sieste. Épuisée, vidée de son énergie. C'était sans compter sur Wyatt. Sa vision dans la chambre lui rappela leur rendez-vous, quelle idiote ! Ses jambes nues couvertes de bleus nouveaux lui faisaient honte et elle craignait qu'il ne le remarque alors qu’elle faisait tout pour qu'il ne soit au courant de rien. Sa pommette blessée la trahissait également. Un mensonge, vite... Rien, elle continua à réfléchir tandis qu'elle parlait d'un ton étrangement assuré. « Hey, je t'attendais pas si tôt... En fait je voulais annuler parce que... Enfin c'est rien t'es là on y va dans deux secondes attends que je me change. » Sourire forcé. Elle attrapa un jean noir plutôt que la robe qu'elle avait préparé plus tôt -montrer ses jambes était devenu exclu- et choisit à la va-vite un haut avant de disparaître dans la salle de bains. Elle se changea en deux temps trois mouvements en évitant de regarder les nouveaux bleus qui apparaissent sur son corps. Elle se maquilla au plus vite, camouflant la légère griffe qu'elle avait sur la pommette sous du fond de teint, et ressortit après avoir vérifié que les traces de sa violente dispute avec Jamie n’étaient plus visibles. Coiffée, maquillée, changée, elle était l'opposé de ce qu'elle venait de présenter à Wyatt. Du moins en apparence. Elle avait envie de pleurer mais retenait ses larmes. Envie de crier mais réprimait ses clameurs. Envie de s'effondrer mais tenait droite. Sa seule pensée était rester droite... « Voilou, désolée pour l'attente. On y va ? » demanda-t-elle en se mettant sur la pointe des pieds pour atteindre sa joue où elle déposa un léger baiser avant d'attraper son sac dans un coin de la pièce.

Il faut le dire, la dispute lors de nos retrouvailles était bien loin désormais. De l'eau avait coulé sous les ponts depuis les faits et nous avions eu d'autres occasions de nous retrouver comme avant. Il m'avait fallu neuf ans pour comprendre, neuf ans et un déclic pour comprendre que je l'aimais, non pas en tant qu'amie mais bien en tant que femme. Je ne l'aimais pas uniquement pour ses formes et son sourire, ni pour le fait qu'elle avait désormais l'une des plus grosses fortunes de la ville grâce à son héritage. Je l'aimais simplement parce que j'avais appris à la connaitre, appris à l'aimer. Celle que je pensais être mon pilier dans la vie s'avérait être bien plus que cela encore. On dit que la frontière entre l'amour et l'amitié était bien mince et facilement franchissable. A vrai dire c'était bien vrai. J'avais fermé les yeux sur mes sentiment, renié ce que je ressentais en espérant ne pas franchir la limite qui aurait brisé notre amitié. Après neuf ans de réflexion, la décision s'était avérée bête et j'avais finalement osé - bien que pour le coup la façon dont je lui avais avoué mes sentiments était pour le moins stupide et avait installé un froid entre nous. Elle avait sa vie, ses sentiments d'autrefois avaient probablement disparu et elle était probablement tombée amoureuse d'autres garçons entre temps, néanmoins j'espérais avoir encore une chance et pour cela j'étais bien décidé à le lui montrer. Pour la première fois depuis  longtemps, j'avais pris le temps de choisir ma tenue avant de partir, contrairement à d'habitude ou je m'en fichais pas mal.
Grimpant les escaliers pour rejoindre le lieux d'où je pouvais entendre l'eau couler, je me permis de me balader dans l'appartement. Jetant un coup d'oeil à toutes les pièces par curiosité, je repéra une superbe robe pendue à la poignée de sa garde robe. Ravis de la voir dans pareille tenue, je haussa les sourcils amusés, avant de me retourner, pensant la voir emmitouflée dans son drap de bain et me poussant dehors pour enfiler cette si jolie robe mais c'est avec surprise que je la retrouva en pantalon. Cachant difficilement ma déception, je compris rapidement que cette robe était prévue pour un autre homme. C'est rien.. T'es.. T'es très jolie. Tu voulais annuler ? Pourquoi ? J'ai prévu une petite surprise mais si tu as quelque chose de plus important ou un autre.. Homme à voir, on peut reporter, c'est pas un problème. Dis-je en haussant les épaules. A vrai dire cette histoire de robe m'avait foutu un léger coup au moral. J'aurais vraiment préféré qu'elle l'enfile pour moi, mais elle devait probablement la garder pour Jamie. Ce mec que je connaissais pas et qui pourtant me courrait vivement sur le haricot. Le regard attiré sur ses jambes fines, je remarquais enfin les bleus qui les couvraient. Ils semblaient bizarrement récents et surtout très douloureux. Fronçant les sourcils, je releva le visage vers elleQu'est-ce que tu as fais pour avoir des bleus pareils sur les jambes? Lâchais-je perplexe. Bras croisés j'attendais sa réponse, je la fixais. Elle ne paraissais pas très en forme, maintenant que je la regardais de plus près. Caleigh. Qu'est-ce qu'il y'a ?! Tu peux m'expliquer ce qui s'est passé ?

Caleigh avait une folle envie de hurler à pleins poumons, mais elle savait pertinemment qu'elle ne ferait rien de plus que fondre en larmes si ses barrières émotionnelles flanchaient. Elle se sentait faible, sans défense. Elle se demandait où était passée la warrior, la Cal qui n'avait peur de rien et se battait toujours jusqu'au bout, qui ne cédait pas, ne lâchait rien et agissait selon son bon vouloir. Sans doute était-elle fatiguée de se battre, épuisée par les nombreuses batailles déjà livrées. Elle n'avait plus la force de combattre, comme un soldat à bout de forces livrant son dernier combat. Ses pensées se bousculaient alors que l'eau ruisselait sur son corps encore douloureux, lavant ses blessures sans pour autant les effacer. Ses larmes finirent par se tarir et elle sortit de la douche, revêtant de vieux vêtements et ne prenant pas la peine de vérifier que ses joues n'étaient plus marquée par les larmes. En sortant... Wyatt. Quelle idiote, comment avait-elle pu oublier qu'ils devaient se voir aujourd'hui ? Bon, si, elle avait pris un sacré coup aujourd'hui, au sens figuré comme au sens propre, et elle n'avait plus toute sa tête. Elle avait mal, elle allait mal. Pourtant, elle sourit. Ou plutôt, força un sourire raté. « En fait j'avais un peu... oublié. J'ai eu beaucoup de trucs aujourd'hui et j'avais la tête ailleurs, j'allais dessiner mais t'es plus important choupi. » Elle lisait en lui comme dans un livre ouvert et il n’allait pas bien non plus. Super. Raison de plus pour ne pas lui avouer ce qui la tourmentait. Elle n'eut besoin de rien dire, il remarqua ses jambes blessées et elle se mordit la lèvre à sa question. « Je suis tombée, tu sais, ma légendaire maladresse... » Peu crédible. Mais elle n'en démordrait pas, elle n'avait pas l'intention d'avouer à Wyatt que Jamie était en fait son fiancé par obligation, qu'ils se mariaient dans moins de trois mois et que c'était un homme violent qui l'avait réduite à l'état de zombie en la rouant de coups indirectement par la faute de Wyatt. C'était beaucoup trop gros. Elle n'avait pas envie d'en parler, pas envie que Wyatt s'éloigne parce qu'elle lui avait caché des choses, ni qu'il porte le poids de son mal être sur ses épaules alors que cela ne le concernait en rien. C'était son combat, même si elle l'avait abandonné depuis plusieurs semaines. « Je suis tombée du podium tout à l'heure à la répétition d'un défilé, mon talon s'est cassé et j'ai plongé dans la salle. Je me suis cogné la pommette droite sur le dossier d'une chaise et les jambes sur les chaises. Du coup je suis fatiguée et j'ai un peu mal mais c'est rien, ça va. » Un bon mensonge détaillé. Cette fois, elle y avait mis beaucoup plus de conviction, on s'y serait cru. Elle priait pour qu'il se laisse berner. Ou, si ce n'était pas le cas, qu'il fasse semblant... Elle disparut dans la salle de bains histoire de s'habiller, de se coiffer, de se maquiller et d'effacer les preuves de son malaise. « Bon, allez, on y va ? » demanda-t-elle à nouveau avec un sourire un peu hésitant mais sincère.

Caleigh était un peu un livre ouvert pour un homme qui avait passé sa vie à l'élever comme sa propre sœur. Elle avait beau mettre une volonté sans faille à me cacher certaines vérité dans le simple but de me protéger, mais même si je faisais mine de ne rien comprendre pour lui faire plaisir et ne rien gâcher, je n'en pensais pas moins. En la retrouvant, certaines choses m'avaient déjà choqué à première vue, mais plus le temps passait et plus je remarquais d'incohérences tant dans son comportement que dans ses réponses. Caleigh avait toujours été cette petite fille vive, au regard clair et plus énergique que jamais, changer de personnalité si rapidement cachait bien souvent une réalité douloureuse. Sans doute tentait elle de se protéger, de protéger la vie que j'avais lâchement quitter, mais je ne me laissais pas berner par son joli sourire pourtant faux. On ne peut pas tromper un parents et si elle n'avait plus les siens, moi je la connaissais presque depuis sa naissance. Rationnel, je savais que quelque chose se passait dans sa vie. Je lui laissais tout le temps de m'en faire part, encore faudrait il qu'elle le fasse à un moment ou un autre. Observateur et doté d'une très bonne mémoire, je ne croyais que très peu à cette histoire de chute de podium, d'autant plus avec les marques qui couvraient son corps. La chute était plausible, certes  mais les traces de doigts sur ses poignets n'étaient surement pas laissé par une chaise ou quoi que ce soit d'inanimé. Le regard plongé sur elle, je détaillais sans retenue son corps marqué, sans répondre. A quoi bon répondre à ce que je savais pertinemment être un énorme mensonge. Si notre relation d'autrefois était purement fusionnelle, j'avais désormais l'impression que ce n'était plus le cas, que mon absence avait brisé ou fragilisé le lien que nous avions mis une dizaine d'années à construire. Je n'avais plus tant l'impression d'être son grand frère mais plus un ami à qui elle rechignerait de dire la vérité. Pas de secret entre nous ? Cette promesse s'était évanouie avec mon départ. Mais si autrefois je ne cherchais pas à en savoir plus, c'était tout le contraire aujourd'hui. Et qu'elle cache ou non la vérité, je la trouverai quoi qu'il arrive. Haussant les épaules mon regard rencontra finalement le siens. Moui. Ta maladresse Répétais-je sans réellement  y croire, mais nous avions prévu une sortie, autant ne pas la gacher trop rapidement. Eclaircissant ma voix, j'ajoutais : Je comptais te faire une surprise et t'emmener voir mon entrainement, mais c'est préférable de reporter si tu es douloureuse. Quand tu seras retapée on le prévoira. De toute façon je suis mou ces derniers temps donc tu n'aurais pas vraiment eu matière à regarder. On va s'en tenir à notre diner. On fera peut-être plus la prochaine fois. Esquissant un demi sourire, je descendis les marches de l'appartement, rejoignant la voiture de laquelle je lui ouvris la porte de façon gentleman avant de me glisser derrière le volant et de démarrer, profitant de la chaleur pour laisser le toit ouvert et profiter du grand air. Démarrant, je pris la direction du centre ville où j'avais réservé une table dans un restaurant plutôt bien coté dans ces fameux guides gastronomique en espérant que la gastronomie ne soit pas synonyme de petites assiettes auquel cas nous serions obligés de repasser chercher une pizza pour avoir enfin l'impression d'avoir mangé à notre faim. Sur la route, je ne pu m'empecher de repenser à cette histoire de chute. Le regard rivé sur la route, lancé à une bonne vitesse, les cheveux au vent, je demandais Cal', est ce que mon départ change quelque chose à notre relation ? Du moins est-ce qu'on a toujours la relation fusionnelle d'autrefois ? Tu me dirais toujours tout, même si cela devait me faire du mal ? Demandais-je en lui jetant quelques petits regards.

Il était clair que Wyatt ne mordait pas à l’hameçon, on s'en serait de toutes manières douté, mais il ne fit aucune remarque, au plus grand soulagement de Caleigh qui n'avait ni la force ni l'envie de débattre au sujet de ce qu'elle faisait passer pour une chute. Il aurait suffit de demander aux autres mannequins si elle était tombée et elle serait grillée. Peu importait, tant qu'il n'insistait pas pour le moment... « C'est comme tu préfères Wyatt, moi ça me déplairait pas d'aller voir ton entrainement, je préfère le rugby aux dîners mais je suppose que tu as réservé. » Elle le suivit, s'installant sur le siège passager elle chercha nerveusement quelque chose à dire mais rien ne le vint. C'est lui qui brisa le silence. Cal se mordilla la lèvre un moment, la réponse était évidemment négativement il le savait. Si, leur relation tenait bon même après neuf ans, mais non elle ne lui dirait rien qui puisse le blesser. Du moins pas aujourd’hui. Bientôt, elle y serait forcée. Mais elle retardait l'échéance... « Je ne t'ai jamais dit ce qui risquait de te faire du mal Wyatt, et je savais très bien que tu faisais semblant de croire à mes mensonges mais j'ai toujours préféré ça. Parce que te voir souffrir est la dernière chose au monde que je voudrais. C'est pire que n'importe quelle torture pour moi alors j'ai toujours tout gardé et je le ferai toujours. C’est pas pour autant que je ne te fais pas confiance ou qu'on a plus la même relation, c'est juste que je supporte pas de savoir que toi ça va pas. Tu passes avant tout. » Elle posa brièvement sa main sur le genoux de Wyatt en le regardant alors qu'il fixait la route. Elle se détourna rapidement, regardant plutôt la route défiler avant d'ajouter vivement, peut-être trop vivement: « Enfin, c'est toujours des suppositions hein, s'il y avait quelque chose qui risquerait de te faire du mal je ne te le dirai pas. Mais c'est pas le cas alors tout va bien. » Menteuse, menteuse. C'était de pire en pire ! Elle ne faisait que s'enfoncer dans ses mensonges.

Certains auteurs disent que l'attachement à la mère conditionne son détachement, mais lorsque la mère se retrouve arraché à son enfant, tout l'attachement s'en retrouve perturbé. C'était un peu mon cas, enfant. Les années avaient passés, mais les vieux démons refaisaient surface depuis quelques nuits. Difficultés d'endormissement, sommeil très voire trop léger, réveils précoces.. En bref, mes nuits se résumaient à un sommeil loin d'être récupérateur. Chaque nuits, les mêmes images apparaissaient sous mes paupières closes. Cet homme. Le  sang par terre. Le visage de ma mère. Ses dernières paroles à mon égard. Et son absence.. Sa douloureuse absence. S'il y'avait bien une chose que Caleigh ne savait pas, c'était bien mon passé. Nous n'en avions jamais parlé. Sans doute s'était elle fait sa propre idée de mon arrivée à l'orphelinat, alors que la réalité était beaucoup plus compliquée à expliquer et surtout très douloureuse. La photo de ma mère constamment sur moi, elle n'avait jamais posé de question et s'était toujours contentée de dire qu'elle était belle. Baillant doucement au volant, je devais avouer que j'étais à moitié concentré. Ecoutant à moitié sa réplique, je compris rapidement ce qu'elle voulait me dire. Effectivement, j'ai réservé dans un bon restau. Je pensais que tu serais contente.. Dis-je, pour le moins ennuyé par sa préférence pour le Rugby. Ce restaurant coutait une petite fortune, j'avais misé sur la gastronomie française pour la séduire et gagner quelques points en ma faveur, naturellement ôté à Jamie, ce fameux type à la cote que je n'avais encore jamais vu et qui pourtant me courrait sur le haricot. Haussant les épaules, j'ajoutais : T'inquiète. Tu pourras venir quand tu seras moins blessée. Dis-je en souriant légèrement avant de m'engager dans le rond point non loin du restaurant. J'espérais au fond de moi même que "Jamie" ne l'ai jamais emmené dans ce restaurant, malgré le pognon qu'il avait dans son portefeuille et qui lui permettait tout. Ralentissant en zone 70, je regardais Caleigh dans un regard en coin. Alors tu ne me dirais rien juste pour me protéger d'une potentielle douleur ? Demandais-je. Passer avant tout ? J'ai toujours privilégié la vérité hormis pour la fois où tu m'as demandé si le père Noël existait vraiment. Je ne t'ai jamais menti sinon. C'est gentil de ta part de vouloir me protéger, mais je ne suis plus un bébé, alors cesse. Dès aujourd'hui. D'ailleurs, faudra que tu me fasses une liste de toutes les choses que tu ne m'as pas dites. Dis-je en descendant de la voiture pour lui ouvrir la porte et la laisser pénétrer dans le restaurant. Un regard posé sur elle, je lui tira la chaise pour qu'elle s'installe avant d'attraper sa main. Ce bleu est vraiment très bizarre.. Il a une forme de main. Un peu comme si on t'avait maintenu de cette façon. Dis-je en glissant doucement les doigts autour de son poignet. Regarde. Parfaite concordance. Alors, tu es réellement tombée ? Ou tu as eu une altercation musclée avec quelqu'un ? Vérité. Pas de mensonge. Dis-je en souriant, pour la rassurer quelque peu et me montrer ouvert. Au fond de moi, mon sang frappait durement mes tempes, tentant tant bien que mal de garder un calme incroyable. Si un homme la frappe ? mmh, Vive la prison.